jeudi 13 novembre 2008

14 Novembre 1983 : Un train pour l'enfer

En 1983, trois futurs légionnaires jettent par la porte du wagon Habib Grimzi. Simplement parce qu'il était arabe.

L'express 343 Bordeaux-Vintimille de 22 h 27, c'est le train des fiers-à-bras, des désespérés, des qui veulent en découdre. C'est nous, les gars de la Légion... Alors on se gare. Et Habib Grimzi comme les autres, jeune homme bien rangé dans son compartiment de la voiture 113, la nuit du 14 novembre 1983, les oreilles en train de rêver sous son Walkman.

Il est heureux, Habib. Il a 26 ans et la vie devant lui. Mais il est arabe. ça se voit sur sa figure comme une mosquée en plein désert. Rien que pour cela, il n'a plus que deux heures à vivre, deux atroces petites heures de torture, de haine et de sang dans le silence des 90 autres passagers, qui remueront à peine une paupière en entendant son cri et le claquement de la porte sur le ballast où s'écrasera son corps en loques, à 0 h 20. Mais cela, Habib ne le sait pas encore. Pour l'instant, il savoure les bons moments passés à Bordeaux avec Florence, sa jeune correspondante. Il imagine ce qu'il va raconter à sa famille, restée à Oran, en Algérie. Sur ses lèvres flotte un sourire. Un sourire qui ne plaît pas à tout le monde.

Mercredi 22 janvier 1986. A Montauban, la ville plus rose que Toulouse, la place du Coq, où se trouve le palais de justice, est bouclée. Malgré le froid, les gens sont là pour apercevoir les accusés. Les télévisions, les journaux et les radios nationales ont fait le déplacement. Des manifestations sont organisées par le Mrap et l'Amicale des Algériens en Europe. Crime de salauds devenus des racistes ou crime de racistes devenus des salauds? Procès de trois brutes ou procès de la société française et des contre-valeurs qu'elle charrie? Tels seront les pôles entre lesquels oscilleront les débats d'un procès de trois jours. Un procès où l'on se souviendra combien ils paradaient, les trois héros, lors de leur arrestation, en gare de Toulouse. N'avaient-ils pas débarrassé la France d'un "raton", ces futurs légionnaires?

Un véritable scénario de film d'horreur

Ce soir du 14 novembre 1983, ils sont donc trois recrues à faire le voyage pour être incorporés dans la Légion. Trois à enfiler bière sur bière au buffet de la gare Saint-Jean de Bordeaux en compagnie du caporal-chef Joseph Logel, chargé de prévenir tout débordement: des fois qu'ils enquiquineraient les filles... Il y a là Anselmo Elviro-Vidal, un Espagnol de 28 ans, type assez complexe, élevé chez les jésuites, cultivé, qui choisit la Légion française pour échapper à la police antiterroriste de son pays. Sur son épaule gauche, une faucille et un marteau sont tatoués. Marc Béani, ensuite, un super-costaud de 22 ans, sourire avenant, mâchoire au carré. Le choix de la Légion, dit-il, c'est par idéal militaire. Xavier Blondel, enfin, fils à papa, effacé. Qu'est-ce qu'il aimerait rentrer dans un trou de souris, celui-là! La Légion, c'était par désespoir. Sa copine... bref. Dans le box des accusés, sous le regard des parents de leur victime, qui découvrent la France pour l'occasion, ils ne font plus le V de la victoire. Profil bas au contraire, hormis pour Elviro-Vidal, qui réclame "une peine exemplaire pour un crime dégueulasse" tout en se défendant d'être raciste. Mais quand il a bu, c'est vrai, les Arabes, il aimerait les "égorger tous".

Dans le train endormi qui fend l'obscurité à 92 kilomètres à l'heure, Elviro-Vidal tangue dans le couloir, histoire de jeter un coup d'oeil dans les compartiments. Au sixième, il tombe sur Habib. Bon sang! Un Arabe! Entre copains, ils viennent justement de cracher ce qu'ils pensent de cette engeance. Celui-là, faut pas le laisser filer. L'homme interpelle le garçon au Walkman, l'attrape au collet, le jette dans le couloir. Les deux autres compères rappliquent sous les protestations molles du caporal-chef. Et, tout de suite, l'excitation monte comme un mauvais alcool, très vite, très fort. Habib est insulté, bousculé, frappé, quand le contrôleur Vincent Pérez apparaît et le soustrait à ses futurs bourreaux en l'emmenant dans le wagon 14, le wagon d'à côté. "Je ne veux pas d'histoire !" prévient-il. A peine a-t-il le dos tourné que commence le scénario d'un film d'horreur qui sera tourné, d'ailleurs, par Roger Hanin sous le nom de Train d'enfer et projeté à Montauban l'après-midi du verdict. Pour l'édification de la jeunesse...

Aussitôt, les brutes retrouvent et extirpent le malheureux Grimzi de son compartiment pour reprendre la fête où ils l'avaient laissée. Béani, jambes écartées, genoux fléchis, brandit un couteau. Blondel défonce la tête du malheureux contre la porte des toilettes. Elviro-Vidal le tabasse. Et ça recommence. On se passe la victime comme un ballon de rugby. Le sang coule, poisse les mains. Il y en a partout et l'odeur monte à la tête. Enfin, Elviro-Vidal ouvre la porte du wagon et pousse Habib Grimzi, qui résiste, supplie et hurle dans le hurlement du train. Vaincu par le pied d'Elviro-Vidal, qui lui enfonce la poitrine, il bascule enfin près de Castelsarrasin, tandis que sa mère dort en paix sous les étoiles africaines.

C'est fini. On claque la porte. On retourne s'asseoir, tout fiers et tout fumants de la lutte. Alors vient le temps du procès où il faut bien entendre Grimzi père raconter qu'il a élevé son fils droit comme un arbre et que cet arbre, maintenant, est déraciné. La noria des experts tente de faire passer ces loups pour des agneaux mal tournés. Alors, Elviro-Vidal se lève et crie que ça suffit, qu'il y a un crime effroyable à juger et qu'il ne faudrait pas oublier la victime. A l'heure du verdict, il recevra sa condamnation avec le sentiment que justice est rendue. Bien rendue: perpétuité pour lui et Béani, qui n'y comprend rien. Et pour Blondel, qui a tenu la porte ouverte, quinze ans pour le prix de sa lâcheté.

Source : L'Express

mercredi 5 novembre 2008

TER : La rançon du succès

Signe des temps, la fréquentation du TER explose. Plus de 26.000 Bretons l'empruntent chaque jour. Un succès qui n'est pas sans poser problème. Sur certaines lignes et à certaines heures, les rames sont pleines à craquer.La scène se passe un lundi matin de février dernier sur le quai de la gare de Rosporden : faute de place dans le train, huit lycéennes restent à quai. Une mésaventure exceptionnelle, certes, mais qui témoigne d'une réalité : le TER attire de plus en plus de monde. Les Bretons n'hésitent plus à laisser leur voiture au garage pour prendre le train. Certaines lignes comme Brest-Landerneau, Brest-Morlaix, Lorient-Vannes ou celles autour de Rennes sont, à certaines heures, saturées. Nombreux sont les passagers qui n'ont d'autre choix que de voyager debout.

50 % en cinq ans
Même si, évidemment, Gérard Lahellec, chargé des transports à la Région, se félicite de cet engouement, il est aussi le premier à reconnaître « que cette situation pose problème ». Le TER est victime de son succès. Pas une région française n'a vu son trafic ferroviaire autant augmenter. En cinq ans, le trafic inter-villes a progressé de 50 %. Sur l'axe Brest-Landerneau, la progression a été de 17 % sur les quatre premiers mois de 2008. L'augmentation du prix du carburant explique en grande partie ce phénomène mais pas seulement. La Région, qui a désormais compétence sur le transport ferroviaire, a mis le paquet pour moderniser et développer le réseau. Depuis 2002, plus de 250 millions d'euros ont été dépensés pour acheter de nouvelles rames, les fameuses ZTER et les automotrices Bombardier AGC. Les 14 dernières de ce programme sont attendues en 2009. Un nouveau matériel confortable et performant, qui séduit les Bretons.


74 millions à la SNCF
Les tarifs, très attractifs, ne sont pas non plus pour rien dans ce succès. La mise en place d'une nouvelle gamme, « plus sociale et plus solidaire », a attiré une nouvelle clientèle. « 5.500 travailleurs précaires ont pris une carte d'abonnement », se félicite Gérard Lahellec. Une politique qui a un coût. Pour chaque voyage, la Région verse un peu plus de 9 euros à la SNCF, soit 74 millions d'euros chaque année. Un voyageur, qui prend le TER, ne paie que 30 % du prix réel du billet. Tout le pari d'une telle politique est de faire en sorte que le potentiel de développement du TER soit dans le même temps préservé. « Cela passe par une contractualisation très exigeante avec la SNCF. Elle est obligée de trouver de nouvelles recettes », souligne l'élu. Outre les 250 millions dépensés pour renouveler le matériel roulant, 34 millions ont été prévus pour rénover les 116 gares et haltes TER. Trois millions sont par ailleurs prévus en fonctionnement pour permettre, dès 2009, d'augmenter la fréquence des trains sur les lignes les plus fréquentées.

Le trafic multiplié par trois d'ici à 2020
Ces investissements suffiront-ils pour répondre à l'explosion du trafic ? Très probablement pas. « On ne pourra sans doute pas attendre 2014 pour acheter d'autres rames », observe l'élu. D'autant que toutes les prévisions indiquent que le trafic TER devrait être multiplié par trois d'ici à 2020. La Région devra répondre à cette demande tout en n'oubliant aucune partie du territoire. « On ne peut pas se contenter de se positionner en transporteur en allant là où sont les flux. Tous les Bretons doivent bénéficier de l'effet TGV. »

Source : Le Telegramme

lundi 3 novembre 2008

Inter-Corée(s): le train de fret circule à vide


Le premier train de marchandises entre les deux Corée, célébré en grandes pompes il y a moins d'un an comme un symbole de rapprochement, circule quasiment à vide. De décembre 2007 à août 2008, 150 des 163 trains ont circulé à vide, selon le ministère sud-coréen de l'Unification chargé de promouvoir les relations avec le Nord.

Seules 340 tonnes de marchandises ont été convoyées. "Cela n'a peut-être aucun sens pour des trains de fret de rouler à vide, mais c'est un projet trop symbolique pour l'arrêter maintenant", a déclaré un porte-parole de la compagnie ferroviaire sud-coréenne Korail. Ce service de fret régulier opérant cinq jours sur sept visait à acheminer des matériaux de construction vers le Nord dans le cadre de l'aide de Séoul à sa voisine communiste.

Source : Le Figaro

dimanche 2 novembre 2008

Le café baisse à la SNCF


C'est une société italienne qui assurera à partir de mars le service de restauration à bord des wagons-bars. Bonne nouvelle pour les usagers : les prix devraient baisser et les plats gagner en exotisme…

Fini, les affreux sandwichs au thon mous et glacés. La SNCF vient de changer de prestataire pour la restauration à bord de ses trains. Dès mars prochain, c'est l'Italien Cremonini qui assurera ce service pendant trois ans et quatre mois. Le nouveau venu apportera-t-il un peu de soleil dans les assiettes des voitures-bars ? Possible. Car à bord des trains Eurostar, Thalys et ID-TGV, dont il assure déjà la restauration via ses filiales Momentum et Rail Gourmet, il propose des lasagnes et des salades tomates-mozzarella. À bord des Thalys, les voyageurs peuvent aussi boire un expresso italien pour 2,30 €, ou s'offrir un «pain focaccia aux tomates mozzarella» à 5 €.

La SNCF ne s'est pas encore prononcée sur les menus qu'elle proposera à bord de ses TGV. Elle doit en effet choisir dans le large éventail que lui a proposé le groupe italien. Mais le principal changement viendra de l'allégement de l'addition. «Nous avons choisi Cremonini, car leurs produits sont 20 à 30 % moins chers que ceux de la Compagnie des Wagons-Lits », confirme un cadre de la SNCF. Par exemple, le café passera de 2,40 à 2,10 € et le sandwich jambon-beurre de 4,10 à 3,50 €. Autre nouveauté : les menus changeront trois fois par an et devraient faire la part ­belle aux produits bio. Cet été en effet, tous les plats froids servis à bords des trains Eurostar étaient organics.

Coup de pub

Jusqu'à aujourd'hui, c'est la Compagnie des Wagons-Lits, filiale du groupe Accor, qui s'occupait des menus à bord des TGV. La SNCF lui a donc préféré l'offre de Cremonini qui lui permet de baisser ses prix. Une bonne chose pour le consommateur, c'est vrai, mais aussi un bon coup de pub pour la société nationale, récemment épinglée par un rapport parlementaire sur l'opacité de ses multiples tarifs de billets.

Enfin, l'offre de Cremonini permettra à l'entreprise nationale de faire des économies. Le service de restauration à bord des trains ne peut en effet pas vivre du seul produit de ses ventes. Car si celles-ci sont bonnes sur Paris-Marseille ou Paris-Strasbourg, elles le sont nettement moins sur des lignes peu fréquentées. Pour que le prestataire, globalement, s'y retrouve, la SNCF doit donc soutenir l'activité. Jusqu'à aujourd'hui, quand un client déboursait 7,50 € au wagon-bar, la SNCF participait à hauteur de 4 €. Avec Cremonini, cette subvention va diminuer de moitié, car l'Italien demande 32 millions d'euros d'indemnités quand la Compagnie des Wagons-Lits en exigeait 80.

Cette économie n'empêche pourtant pas l'entreprise publique de réfléchir à terme à la suppression du wagon-bar.

Source : Figaro

samedi 1 novembre 2008

La SNCF condamnée pour le décès d'un homme qui avait sauté d'un train sans titre de transport


NANCY (AFP) — La SNCF a été condamnée par la chambre civile de la cour d'appel de Nancy à verser 108.000 euros à la famille d'un homme qui était mort après avoir sauté d'un train venant de démarrer en gare de Nancy en 2002, ont indiqué vendredi les avocats des deux parties.

Le 24 janvier 2002, l'homme, trentenaire, avait aidé sa tante à s'installer à sa place, sans se rendre compte que le train pour Montpellier démarrait. Après avoir tenté d'ouvrir une première porte, sans réussite, il avait traversé un wagon et réussi à en ouvrir une seconde. Mais en sautant, il était tombé sous le train et avait été écrasé.

"Entre 0 et 7 km/h, les portes sont fermées mais pas verrouillées, ce qui répond à une règle de l'Union internationale des chemins de fer. Ceux qui comme la victime veulent descendre du train peuvent toujours le faire, mais à leurs risques et périls. La SNCF l'interdit mais ils le font quand même", a observé Me François Robinet, avocat de la société.

L'homme, en tant qu'accompagnateur, n'avait en outre aucun titre de transport, ce qui excluait toute "responsabilité contractuelle en terme de sécurité" de la SNCF, selon Me Robinet.

La compagnie ferroviaire "ne pouvait pas prévoir que la victime allait sauter d'un train en marche", a affirmé l'avocat de la défense, pour qui l'accident relève du "cas de force majeure, indépendant de la volonté" de la SNCF.

"Mais il y avait aussi un problème d'audibilité au niveau du système sonore. L'annonce de départ du train n'a pas du tout été entendue par la victime", a pointé Me Aude Perrin, qui défend la famille du trentenaire.

"L'enjeu dépasse de toute façon les dommages et intérêts obtenus par mes clients. La SNCF pourrait être amenée à changer le système de sécurité de tous ses trains" si les condamnations du genre se multipliaient, a commenté l'avocate.

Selon Me François Robinet, lors d'un entretien avec l'AFP, la SNCF pourrait se pourvoir en cassation de cet arrêt, qui confirme la décision rendue en première instance par la deuxième chambre civile du tribunal de grande instance de Nancy en avril 2006.

Source : AFP